Le projet PPI (Pilotage, Planification et Intégration) vise à moderniser l’écosystème financier d’AG2R LA MONDIALE avec un déploiement prévu en décembre 2025 et janvier 2026. Il s’agit d’une migration vers Oracle Cloud remplaçant plusieurs outils existants (Synertrade, CODA, Accurate, COGNOS). Le CSE et la CSSCT ont été informés et consultés sur les impacts sociaux.
Le projet PPI (Pilotage, Planification et Intégration) marque un tournant majeur dans la transformation digitale d’AG2R LA MONDIALE. Avec un déploiement prévu entre décembre 2025 et janvier 2026, cette migration vers Oracle Cloud soulève autant d’espoirs que d’inquiétudes. La CFDT, après avoir examiné en détail ce dossier lors des instances CSE et CSSCT, livre une analyse nuancée : un projet nécessaire, mais dont les conditions de mise en œuvre suscitent de sérieuses réserves.
Un projet ambitieux aux objectifs louables
Reconnaissons d’emblée les mérites de l’initiative. PPI répond à des besoins réels et identifiés depuis longtemps : améliorer le pilotage économique avec des analyses de marge plus fines, unifier le processus Budget-Engagement-Décaissement (BED) avec un contrôle budgétaire bloquant, et automatiser de nombreuses tâches manuelles chronophages.
La CFDT salue également la démarche participative adoptée en amont : les utilisateurs ont été impliqués dès le choix de la solution et lors des phases de recette. Des dispositifs d’accompagnement sont annoncés, avec formations, réseau d’ambassadeurs, et appui de la DSID. Sur le papier, le projet semble bien ficelé.
La charge de travail : une bombe à retardement ?
Mais c’est précisément là que le bât blesse. Les remontées du terrain sont sans appel : les salariés craignent une augmentation significative de leur charge de travail. La complexité de l’outil, les saisies supplémentaires, et surtout le calendrier de déploiement en pleine fin d’année génèrent une tension palpable.
Lors de la CSSCT du 17 octobre 2025, la direction n’a d’ailleurs pas nié avoir demandé des « efforts » aux équipes. Plus inquiétant encore, il aurait été demandé à certains salariés de ne pas poser de congés en fin d’année et de « ne pas compter leurs heures ». La DRH, consciente que cette situation n’était pas tenable, s’est saisie du sujet. Mais pour la CFDT, cela révèle un problème structurel : le plan d’accompagnement n’est pas assez solide dans la phase transitoire.
Nous demandons donc la mise en place d’un suivi mensuel de la charge de travail pendant cette période critique, ainsi qu’un dispositif d’alerte simple permettant aux salariés de signaler rapidement leurs difficultés. Les congés de fin d’année doivent être préservés, quitte à prévoir un lissage de charge ou des renforts ciblés.
Un calendrier trop ambitieux
Le séquencement du projet est pour le moins audacieux : ouverture du processus BED le 1er décembre 2025, puis déploiement complet au 1er janvier 2026. Pour la CFDT, ce calendrier ne laisse aucune marge de manœuvre en cas de difficultés opérationnelles.
Un pilote a certes été déployé en juin 2025, mais qu’en est-il réellement des retours d’expérience ? Les ajustements ont-ils été suffisants ? La direction assure que des équipes resteront mobilisées jusqu’au 30 juin 2026 pour effectuer les ajustements nécessaires. Mais cela signifie aussi que le système ne sera pleinement stabilisé que six mois après sa généralisation. Six mois pendant lesquels les salariés devront composer avec les bugs, les dysfonctionnements, et l’apprentissage d’un outil complexe.
La CFDT demande donc des marges d’ajustement dans le planning et, surtout, des procédures de secours documentées en cas d’incident majeur. Que se passera-t-il si la plateforme connaît une panne pendant la période critique de fin d’année ? Quels plans de contournement sont prévus ?
Compétences et emplois : une zone d’ombre préoccupante
L’un des points les plus inquiétants de ce dossier reste l’absence d’étude d’impact formelle sur les métiers et les ressources. La direction affirme que l’objectif n’est pas de faire des gains de productivité ni de réduire les effectifs. Mais sous la pression de nos questions, elle n’a pas nié que l’intelligence artificielle pourrait, à moyen terme, automatiser certaines tâches.
Or, ces paramètres ne peuvent pas être mesurés aujourd’hui, nous dit-on. C’est justement ce flou qui nous préoccupe. Comment anticiper les évolutions de compétences si on ne sait pas précisément quelles tâches seront automatisées demain ? Comment accompagner les salariés dans leur montée en compétences si on ne connaît pas les besoins futurs ?
La CFDT exige donc la réalisation et le partage d’une étude d’impact métiers et ressources avant la généralisation, accompagnée d’un plan d’actions concret. Ce sujet doit également être au cœur des travaux de l’observatoire des métiers et de la renégociation de l’accord GAPEC en 2026.
Formation : un plan trop léger
Le plan de formation présenté manque cruellement de détails. Certes, des tutos et des bandeaux explicatifs personnalisés ont été créés, et des ambassadeurs sont mobilisés. Mais où sont les garanties sur la disponibilité des temps de formation ? Quels sont les objectifs par rôles ? Quel est le calendrier précis ?
La CFDT demande un plan de formation complété, avec un calendrier détaillé et des temps dédiés clairement identifiés. L’accompagnement au poste, notamment, doit être renforcé. Il ne suffit pas de mettre à disposition des tutoriels : il faut du temps pour se les approprier, pour poser des questions, pour expérimenter sans pression.
Qualité et fiabilité : trop de zones grises
Autre point de vigilance majeur : le manque de tests poussés auprès de toutes les entités. Des spécificités métiers n’ont pas été suffisamment prises en compte, et les plans de contournement en cas de dysfonctionnements ne sont pas clairement établis.
La CFDT réclame donc l’organisation de tests renforcés dans l’ensemble des entités concernées, ainsi que la documentation de procédures de secours robustes. Mieux vaut prévenir que guérir : investir dans des tests approfondis aujourd’hui évitera des crises opérationnelles demain.
Un avis favorable mais assorti de réserves
Face à cette situation, la position de la CFDT est claire et assumée. Nous reconnaissons que le projet PPI répond à des besoins réels d’amélioration du pilotage budgétaire, de la gestion des dépenses et de la décision. C’est pourquoi nous avons rendu un avis favorable.
Mais cet avis favorable est assorti de nombreuses réserves. Nous attendons la mise en œuvre effective de l’ensemble de nos demandes, visant à sécuriser la charge de travail, la montée en compétences et la qualité du service pendant la transition et après la mise en production.
La direction s’est engagée à revenir devant le CSE ou la CSSCT fin juin 2026 pour faire un point d’étape. Nous serons au rendez-vous et resterons vigilants. La CFDT demande également des revues post-déploiement à 3 et 6 mois avec possibilité d’ajustements si nécessaire.
Au-delà de PPI : un débat de fond sur la transformation digitale
Plus largement, le projet PPI soulève des questions qui dépassent le cadre technique. Il génère des modifications technologiques, introduit de nouveaux outils, et ouvre la porte à l’automatisation de certaines tâches via l’intelligence artificielle.
Pour la CFDT, cela doit être l’occasion d’avoir un débat transparent sur ces sujets, notamment à travers les travaux de l’observatoire des métiers et lors de la renégociation de l’accord GAPEC en 2026. Quelles sont les conséquences de la transformation digitale sur nos métiers ? Comment accompagner les salariés dans ces évolutions ? Comment garantir que la technologie soit au service de l’humain, et non l’inverse ?
Ces questions sont essentielles. PPI n’est qu’un exemple parmi d’autres d’une transformation plus vaste qui touche l’ensemble du monde du travail chez AG2R LA MONDIALE. La CFDT entend porter ces sujets avec force et détermination dans les mois à venir.
Conclusion : moderniser, oui, mais pas à n’importe quel prix
Le projet PPI incarne bien les contradictions de notre groupe : le besoin de modernisation est réel, les outils technologiques offrent des opportunités indéniables, mais leur mise en œuvre soulève des défis humains considérables.
La CFDT ne s’oppose pas au progrès. Nous demandons simplement que ce progrès soit pensé avec et pour les salariés, et non malgré eux. Que la charge de travail soit tenable. Que les formations soient à la hauteur. Que les emplois et les compétences soient anticipés et protégés.


Bonjour, impactè par le projet PPI, j ai lu avec attention votre article très complet. De fait j ai beaucoup de mal à comprendre comment vous pouvez mettre autant en avant l’instabilité du projet et la mise en danger des équipes tout en étant favorable au déploiement en janvier. Vous flattez les collaborateurs en explicant que vous êtes vigilents et en même temps vous félicitez la direction en lui accordant un avis positif. Dommage ! Votre calcul est de ne vous fâchez avec personne ?
La motivation de l’avis de la CFDT a été de reconnaitre que le projet PPI répond à des besoins réels d’amélioration du pilotage budgétaire, de la gestion des dépenses et de la décision. C’est pourquoi nous avons rendu un avis favorable. Mais cet avis favorable est assorti de nombreuses réserves et une demande forte de suivi.
Dans ce cas de figure, nous avons trois options : l’abstention, qui ne se justifie que si des éléments restent sans réponse, le refus, qui est un avis de défiance mais surtout de volonté de blocage, l’avis favorable, qui peut être assorti de réserves. Nous avons préféré cette dernière solution, qui laisse la place à des discussions et des aménagements ultérieurs si des dérapages étaient constatés.