Les dirigeants du régime AGIRC ARRCO ont dénoncé la semaine dernière un risque de «captation» de leurs recettes par la Sécu à partir du 1er janvier. Car la situation se résume peut-être tout simplement à un détournement de 84 milliards d’euros de cotisations..
L’AGIRC ARRCO craint un grand «détournement». Le président de l’Agirc-Arrco, Didier Weckner, a employé le mot à plusieurs reprises lors d’une conférence de presse pour décrire le transfert du recouvrement de ses quelque 84 milliards d’euros de cotisations à l’URSSAF, qui assure la trésorerie de la Sécurité Sociale.
On peut effectivement s’étonner du passage en force du gouvernement qui a décidé de maintenir une partie de transfert du recouvrement des cotisations au 1er janvier 2023 malgré les alertes sur les difficultés techniques de cette opération.
En effet, depuis plusieurs mois, les organisations syndicales et patronales, ainsi que les institutions de retraite complémentaire, alertent le gouvernement sur les difficultés techniques existantes. Elles doutent de la fiabilité du recouvrement des cotisations et craignent des erreurs, qui pourraient impacter les droits à la retraite des salariés du privé. Dans un courrier commun, datant de fin septembre, les partenaires sociaux ont ainsi demandé au gouvernement le report de la réforme.
«A trois mois du démarrage, personne n’est prêt», a affirmé le directeur du régime complémentaire, François-Xavier Selleret, alertant sur un «risque majeur» pour le calcul des droits des futurs retraités du privé. «Les risques sont trop élevés pour faire ça à l’arrache», a insisté la vice-présidente, Brigitte Pisa, dénonçant «un dialogue de sourds» avec Bercy. «On est à un point de rupture», a-t-elle ajouté, expliquant que «la captation de nos ressources, ça n’est pas entendable».
Pourquoi cet entêtement des pouvoirs publics ?
La réponse tient sans doute dans un seul chiffre : les 84 milliards d’encaissements de l’AGIRC ARRCO en 2021.
Rappelons que l’Agirc-Arrco a une situation saine, sans dette et avec un excédent attendu de 3,5 à 4 milliards d’euros cette année, ce qui a permis à son conseil d’administration de voter une hausse de 5,12% des pensions pour ses 13 millions de retraités, à compter du 1er novembre. Cette revalorisation, qui coûtera 4,5 milliards en année pleine, ne remet pas en cause la «règle d’or» du régime, dont les réserves (évalués à 62 milliards fin septembre) restent supérieures à 6 mois de versements sur un horizon de 15 ans. Sans même avoir besoin de toucher à l’âge légal de départ.
Alors, comment ne pas être tenté de mettre la main sur 84 milliards d’encaissements par an, et peut-être plus tard sur 62 milliards de réserves, dans la situation actuelle de déficit de la Sécurité sociale et avec les nouveaux besoins de financement de la protection sociale comme la dépendance ?
En réalité, le problème du transfert du recouvrement des cotisations de retraite complémentaire vers les URSSAF se résume peut-être qu’à un problème de captation des ressources, et à des décisions politiques du gouvernement.
Ce serait détourner l’argent de 25 millions de cotisants par an, de 57 millions d’assurés, fonds gérés par leurs représentants dans des institution paritaires depuis plus de 60 ans.
des années que les gouvernements successifs rêvent de récupérer les réserves de l’AA organisme finalement plutôt bien géré par les partenaires sociaux méprisés par la macronie. Un comble pour des politiques qui ont toujours échoué pour le redressement des comptes de la sécu… A l’instar de pomper Action Logement (autre organisme paritaire), le gouvernement actuel commence par le recouvrement qui, au passage, semble lui faire payer cette prestation à un coût supérieur… si ce n’est pas du paritarismebashing…
Pour info, les députés ont ANNULE lundi 10 octobre les transfert des cotisations de l’Agirc Arrco via l’adoption de 6 amendements
Ce n’est pas une bonne nouvelle. Tôt ou tard celà se fera 2024…
L’info n’est pas complètement exacte. C’est la commission des affaires sociales de l’assemblée nationale qui a adopté six amendements au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 annulant le transfert du recouvrement des cotisations Agirc-Arrco aux Urssaf acté par la LFSS 2020 contre l’avis de la rapporteure générale du texte, Stéphanie Rist (Renaissance). Le texte avec les amendements doit encore être vu en séance à l’assemblée nationale le 20 octobre et les amendements peuvent être rejetés. Et reste la menace du 49-3 du gouvernement…
Merci pour cette correction. Donc pour l’instant la bataille se situe bien au niveau de la loi de finance 2020 et mise en œuvre en 2023 ou 2024?
Non, ces milliards n’appartiennent pas non plus à la Fédération AGIRC ARRCO. Il y a quelques années, ces cotisations et surtout les excédents imposés était du côté des caisses de retraite complémentaire. Dans l’optique d’une seule entité juridique et gestionnaire, la puissance de l’état ( plus ou moins forcée avec les partenaires sociaux) mettra main basse sur ces cotisations et surtout les réserves. Ceci permettra à l’état assis à la table des négociations avec les différents partenaires sociaux de bénéficier de fonds pour écrire la nouvelle histoire 2.0.3.0 de la retraite et de la sécu. Combien de branches différentes y a t’il dans la sécu? Quelles sont celles qui ne sont pasendettéess? Quel avenir pour notre modèle social de plus en plus mis à mal? Quelle réponse faut-il apporter pour les années à venir? Petit à petit tout est grignoté par l’état (et peut-être les assureurs)!