Un projet de réorganisation de la direction santé prévoyance a été présenté au CSE le 26 novembre pour une mise en oeuvre le…1er décembre ! La direction a décidé de ne pas demander l’avis des représentants du personnel et de passer en force.
La réorganisation décidée a deux volets.
Le premier volet concerne les 4 directions santé prévoyance.
L’objectif de cette partie du projet est de modifier l’organisation de la direction en l’articulant en trois sous directions au lieu de quatre :
- une Direction technique : Responsable du pilotage technique, conformité, communication, marketing et digital
- une Direction des opérations (ex-direction de la gestion) : En charge de la gestion, du budget, de la délégation de gestion et de la satisfaction client
- une Direction des accords de branches : Maintien des activités actuelles.
En 2022, la direction avait choisi de créer une 4ème direction spécifique concernent le pilotage, le contrôle et le suivi budgétaires. Cette direction est supprimée.
Or, la directrice santé prévoyance qui venait d’arriver dans le groupe expliquait “Comme toutes les directions, nous devons mettre en œuvre un plan de performance, qui implique de suivre et de piloter les budgets et les effectifs. Le projet prévoit de rattacher ces activités directement à la Direction Santé Prévoyance pour permettre une vision globale, sachant qu’aujourd’hui, ces sujets sont suivis dans chaque direction qui compose la Direction Santé Prévoyance, ce qui constitue un obstacle à la mutualisation et nous empêche de piloter les ressources de manière globale. Grâce à ce rattachement, nous pourrons mieux allouer nos budgets et formuler nos demandes de recrutements en fonction des endroits où les besoins se font le plus sentir.”
Aujourd’hui, changement de discours. On supprime la direction Pilotage et Contrôle pour répartir ses activités entre la direction technique et celle des opérations.
Quid de la vision globale ? Quid de la mutualisation ? Quid du pilotage global ?
Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis. Et la direction santé prévoyance a décidé de changer radicalement d’avis.
Quels sont les contre arguments qui justifient ce virage à 180 degrés ?
En 2022, pour la direction les enjeux de conformité et de redressement d’AG2R P étaient majeurs. C’est pourquoi les sujets étaient directement rattachés à la direction santé prévoyance. Or, en 2024, le redressement est bien entamé. La plateformisation est devenu un nouvel enjeu fort. Ce nouveau contexte justifierait d’éclater l’ancienne direction pilotage, contrôle et suivi budgétaire dans les deux autres directions.
Pour la CFDT, la justification est bien mince. La réponse à un enjeu de meilleur pilotage des activités de gestion déléguée d’un point de vue réglementaire(ACPR) justifie certainement d’intégrer ce pilotage à la direction des opérations qui aura ainsi une vision plus globale et plus cohérente. Mais que penser de l’intégration aussi à cette direction des opérations de son propre contrôle et suivi budgétaire ? C’est lui donner le double rôle de juge et partie.
Le second volet de la réorganisation concerne la sous direction Support Prévoyance Santé DSPS .
Cette sous direction était divisée en trois activité : entreprises, prestations santé et prestations prévoyance.
La réorganisation prévoit de maintenir deux activités : entreprise et prestations. Mais l’activité prestations sera sous divisée en prestations santé et prestations prévoyance. Quelle justification sinon créer un niveau de management supplémentaire ?
Pour la CFDT, les documents fournis pour l’information sur ce projet ne présentaient aucune justification solide à cette réorganisation. Si les débats avec la directrice de l’activité ont permis de creuser le sujet, les arguments plaidant pour les changements manquaient de consistance. Or, la nouvelle organisation ne se résume pas seulement à des changements hiérarchiques, elle peut aussi casser la dynamique d’équipes qui se trouveront éclatées. Elle suscite surtout l’incompréhension des salariés concernés qui y voient un bidouillage de l’organigramme sans véritable sens opérationnel et stratégique.
C’est pourquoi la CFDT a demandé que la mise en oeuvre puisse être différée afin que les représentants du personnel puissent se rapprocher des salariés pour recueillir leurs avis, leurs préoccupations et leur éventuelles contre propositions. Cela permettrait également à la direction de mieux expliquer son projet. Le CSE a donc voté à l’unanimité la délibération suivante :
Compte tenu de l’importance du projet et de la modification substantielle de l’organigramme d’une part, et du délai entre l’information des élus, le 26 novembre, avec une mise en oeuvre du projet, le 1 décembre, le CSE demande a être informé et consulté lors du prochain CSE. Ce délai permettra notamment aux élus de recueillir les réactions des salariés concernés et de rendre un avis éclairé sur le sujet.
La direction a refusé catégoriquement de demander l’avis des élus d’une part, et de différer la mise en oeuvre d’autre part.
Elle passera donc en force et appliquera son projet 5 jours après avoir informé les élus, soit le 1er décembre. Seule la seconde partie de la réorganisation, celle de la DSPS, ne sera effective qu’au 1er janvier 2025.
En définitive, cette réorganisation menée tambour battant soulève plus de questions qu’elle n’apporte de réponses. Elle illustre parfaitement le fossé qui peut se creuser entre une direction pressée d’imposer ses changements et des salariés qui aspirent légitimement à comprendre et à contribuer à l’évolution de leur travail.
Dans un contexte où l’adhésion des équipes est cruciale pour la réussite de tout projet de transformation, cette précipitation et ce passage en force interrogent sur la méthode et risquent de laisser des traces durables dans le dialogue social. Une chose est sûre : la rapidité d’exécution ne fait pas toujours bon ménage avec la qualité du changement.