Lors de la réunion plénière du CE le 26 septembre, les élus devaient rendre un avis sur les orientations stratégiques du groupe. L’avis a été défavorable à l’unanimité des élus.
Texte de l’avis rendu
Au terme de la précédente consultation sur les orientations stratégiques du groupe, fin 2017, les élus du comité d’entreprise ont regretté que la présentation du nouveau plan d’entreprise 2018/2020 n’ait pas été l’occasion pour le groupe, compte tenu des évolutions majeures de notre environnement, de préciser qu’elle était sa vision stratégique à moyen terme.
En particulier, qu’il précise les points forts sur lesquels il s’appuiera pour se différencier de la concurrence, pour devenir « l’assureur préféré des français », présentée comme l’ambition stratégique du groupe.
In fine, nous demandions fin 2017 :
- Dans ce contexte inédit, quel positionnement pour AG2R LA MONDIALE ?
- Quels seront nos métiers demain et dans quelles conditions les exercerons-nous ?
- Comment asseoir encore notre légitimité et peser dans la recomposition du marché ?
- Comment anticiper et tirer parti des évolutions à venir coté retraite complémentaire ?
- Comment sur le domaine assurantiel nous différencier des autres acteurs, préserver nos parts de marché et conquérir de nouveaux territoires ?
Face à cette absence de visibilité, de communication et de transparence sur les grandes orientations stratégiques, les élus se demandaient quel modèle le groupe souhaitait-il construire ?
Nous avons ensuite compris qu’une partie de ces questions devaient trouver leurs réponses, au travers du rapprochement avec la MATMUT, annoncé peu de temps après le lancement du plan d’entreprise. ….. Parenthèse aujourd’hui refermée !
Parenthèse sans doute couteuse dont nous attendons toujours la facture détaillée.
Avant de revenir, plus loin, sur nos interrogations sur la stratégie du groupe, nous pouvons constater que les actions du plan d’entreprise, au travers des 4 programmes de transformation, sont mises en œuvre et que des avancées notables ont été réalisées. Pour autant, nous nous interrogeons sur les objectifs de ce plan et le cap à atteindre :
En assurantiel, la faible dynamique commerciale exprime, selon nous, le fait que le groupe n’est en réalité pas encore en « ordre de marche » pour faire face efficacement à la concurrence et aux attentes de nos clients : transformation de la distribution inopérante et qui s’apparente en réalité à un plan d’économie, mauvais positionnement des gammes de produits, rationalisation des outils SI encore en cours, digitalisation au stade du rattrapage, stratégie de services en chantier.
In fine, nous sommes contraints d’avancer à « marche forcée » sur l’ensemble des très nombreux chantiers, afin de « délivrer » rapidement des résultats.
Ensuite, tant côté Retraite Complémentaire que Santé Prévoyance, les programmes de transformations sont mis en œuvre dans un contexte laissant peu de marges de manœuvre compte tenu des objectifs financiers (une ambition de résultats élevés, et ceci, prioritairement, afin de renforcer le ratio S2 dans tous les scénarios de taux) et de réduction des coûts, ce qui constitue une contrainte forte pour les équipes.
A l’énoncé de ces éléments, force est de constater que sur l’ensemble de nos métiers, le groupe ne permet pas à ses salariés de produire une qualité de service à la hauteur des attentes des clients.
Dans ce contexte « tendu », il est dommage que la démarche visant à objectiver par des indicateurs (autre que financiers) les avancées du plan d’entreprise ait été à priori abandonnée. Cela permettrait par exemple, de mesurer l’impact de ce plan sur les conditions de travail.
Nos interrogations de 2017 demeurent pleinement d’actualité. Celles-ci s’expriment aujourd’hui avec plus d’inquiétudes et d’attentes de réponses compte tenu des évolutions récentes et majeures que connaissent notre environnement et notre groupe :
- l’arrêt du rapprochement avec la MATMUT,
- le 100% santé,
- la poursuite de la baisse des taux,
- la loi Pacte,
- la réforme des retraites et à court terme le projet d’agence de recouvrement unique des cotisations sociales .
Sur chacun de ces points, de nombreuses questions se posent auxquelles nous souhaitons que des réponses claires et détaillées soient apportées aux élus du comité d’entreprise.
- Comment le groupe compte-t-il atteindre son objectif de devenir un groupe complet ? quelles options apparaissent aujourd’hui encore possibles ? sous quelle forme (rapprochement, partenariat plus ou moins structurant) et avec quels acteurs ? la concentration déjà fortement engagée du marché laisse-t-elle encore, après l’échec avec la MATMUT des opportunités de même nature ? le groupe est-il réellement « attractif » ? son organisation et son mode de gouvernance sont-ils en particulier aujourd’hui des freins ou encore des atouts ? quels risques/avantages à rester durablement « seul » compte tenu du contexte ?
- Quelles pourraient être les conséquences pour le groupe d’un maintien prolongé des taux à leur niveau actuel ? et quelles réponses stratégiques le groupe compte-t-il y apporter ?
- N’avons-nous pas dans ce contexte intérêt à renforcer nos moyens pour progresser significativement en santé individuelle (activité peu sensible à l’évolution des taux) afin de rééquilibrer le rapport individuel/collectif dans nos activités Santé/Prévoyance) ? dans ce cadre, où en sont les « réflexions » sur la Mutuelle Générale ?
- Quelle est la stratégie du groupe concernant la Loi Pacte et la création du PER, qui voit s’estomper les frontières entre l’individuel et le collectif sur l’épargne retraite et salariale, l’assurance vie et la gestion d’actifs. Dans quelle mesure, cette loi remet-elle en cause nos partenariats (EPSENS, ARIAL CNP Assurances) ou fait évoluer les perspectives de rapprochement ?
- Dans le domaine de la protection sociale, des bouleversements majeurs vont fortement impacter notre groupe. Les préconisations du Haut-Commissariat à la réforme des retraites, le récent rapport Gardette, le projet de loi de finances et le rapport de l’IGAS laissent présager dans leurs grandes lignes, une « rationalisation » en plusieurs étapes des acteurs de la protection sociale en France. Tant les métiers de la relation client, de la retraite complémentaire (entreprises et particuliers) mais aussi de l’action sociale, subiront de profondes réorganisations au sein de notre groupe.
- Dès l’été 2020, avec l’absorption par la Caisse Nationale de retraite universelle des équipes des structures existantes nécessaires à sa mission de préfiguration et de pilotage de tous les chantiers inter-régimes ainsi que tous les projets utiles à la mise en œuvre du SUR.
- Pour 2022, le rapport GARDETTE annonce le recouvrement des cotisations sociales confié à l’ACOSS. Le scénario proposerait une délégation de traitement des déclarations de salaires maintenu auprès de l’AGIRC/ARRCO jusqu’en 2024.
- Sur la période 2025/2030, il est envisagé un pilotage exclusif ACOSS et CNRU de la retraite en France.
Que devient alors l’existence juridique nationale de la fédération AGIRC/ARRCO et des groupes de protection sociale ?
Comment le groupe s’articulera t’il autour des 2 métiers assurantiel/retraite qui l’ont historiquement construit ?
Enfin, à travers ces grands chantiers gouvernementaux il reste aussi un manque de visibilité à la fois sur l’organisation de l’interlocuteur unique, (entreprise, futurs retraités), que sur celle de l’action sociale, atouts majeurs de cette rationalisation.
- Comment notre groupe envisage-t-il de se positionner sur ces
sujets ?
- Avec quelles organisations de travail à la fois au regard de la sous traitance mise en place que des emplois confiés en interne (CDI et CDD) ?
- Sur l’ensemble des points concernant la Retraite Complémentaire, il est important que la Direction du groupe précise clairement et rapidement la façon dont elle compte aborder l’ensemble des enjeux liés à ces bouleversements.
- Face ces profondes évolutions, nous attendons :
- D’une part, d’être pleinement et plus régulièrement informés des conséquences à court et moyen terme de ces évolutions sur le groupe, ses activités et ses salariés, des réponses possibles et des choix stratégiques retenus par le groupe,
- que soient en particulier précisés clairement, les enjeux et impacts de ces bouleversements (et des réponses stratégiques apportées par le groupe) sur l’emploi, les métiers (et leurs conditions d’exercice) ainsi que sur les conditions de travail.
- Enfin, s’agissant de l’emploi, des métiers et des compétences en lien avec les orientations stratégiques (GAPEC), le groupe doit répondre rapidement à deux enjeux majeurs :
- La nécessité d’améliorer la visibilité surla trajectoire quantitative de l’emploi. Il s’agit non seulement de l’affiner par Direction/Métiers, de l’articuler aux enjeux d’évolution des compétences mais aussi et surtout d’amorcer une politique d’embauche volontariste permettant à la fois de soulager rapidement les métiers en forte tension depuis longtemps, mais aussi de positionner par de meilleurs résultats quantitatifs le groupe sur les « compétitions » à venir.
- Sa volonté à mobiliser enfin et sans délai des moyens matériels, humains et financiers pour la construction des parcours professionnels, le développement des compétences, des mobilités associées à une communication adaptée envers les salariés ; afin d’être la hauteur des enjeux de transformation et d’évolutions rapides des métiers.
Par conséquent, les élus du comité d’entreprise rendent un avis défavorable sur les orientations stratégiques du groupe.