Le CSE rend un avis sur la politique sociale

Comme chaque année, le CSE s’est prononcé sur la politique sociale. Voici l’avis unanime de toutes les organisations syndicales pour l’année 2023. En conclusion, les élus appellent à ne plus faire porter les économies de gestion sur les frais de personnel, la limite du supportable ayant été atteinte.

Avis des élus sur la politique sociale 2023

L’emploi

Volume d’emploi

Au niveau global de l’UES et pour la première fois depuis 2015, les élus constatent une forte dynamique de recrutement avec un volume d’embauches externes et de titularisations qui permet de couvrir les départs en CDI.

Le taux d’entrée CDI augmente significativement et s’élève à 7,6% en 2023 (vs 2,8% en 2022), soit 289 entrées CDI, chiffre inédit sur la période étudiée. En parallèle, le taux de départ CDI s’élève à 6,1% en 2023 et reste relativement stable par rapport à 2022.

De ce fait, 2023 rompt avec la tendance baissière des effectifs CDI observée depuis plusieurs années avec une hausse de + 1 % du nombre de salariés.

Néanmoins, cette tendance n’est pas vraie pour toutes les entités.

En effet, les effectifs du GIE AG2R sont en baisse de 3% en 2023 par rapport à 2022 (85 CDI en moins) et de 10% par rapport à 2021 (282 CDI en moins).

A l’inverse, les effectifs de l’IRC augmentent significativement de 7% entre fin 2022 et fin 2023, nous laissant constater que la croissance des effectifs de l’UES est portée uniquement par l’IRC.

Cependant, le plan de recrutement initialement prévu de 350 embauches pour 2023 en retraite n’a pas été atteint.

Les élus pointent toujours le manque grandissant d’attractivité des métiers du groupe, notamment à cause du décalage salarial avec nos principaux concurrents.

Même si la direction a revalorisé les salaires d’embauche en 2023, les élus jugent cette décision trop tardive. Ils regrettent que les règles d’application des augmentations salariales collectives au-dessus de 18 mois d’ancienneté accentuent et nourrissent un nivellement des salaires vers le bas.

D’autre part, ces revalorisations restent toujours en dessous d’un marché en forte concurrence (notamment sur les grandes agglomérations).

Adéquation des besoins et des moyens

Sur l’activité santé prévoyance, la baisse du nombre de CDI n’est pas compensée par le recours aux CDD. En effet, les embauches CDD sont en baisse en 2023 dans toutes les familles de métiers, notamment celle de la Gestion et de la Relation Client, qui emploie une grande majorité de ces types de contrat (plus de 90% des embauches CDD concernent cette activité).

Ce constat pose la problématique de l’adéquation des moyens humains aux besoins.

Si l’activité est bien mesurée et suivie, il n’existe cependant pas de dispositif suffisant pour quantifier et suivre la charge de travail.

De plus, les élus déplorent que cette adéquation entre le volume d’emploi, les évolutions des activités et les besoins remontés par les directions ne soient pas étudiés et débattus au sein du CSE.

En l’absence de ces démarches prospectives, le risque est de donner une prédominance aux contraintes budgétaires, sans prise en compte des conditions de travail des salariés et de la qualité du service rendu aux clients.

A noter que la majorité des démissions se concentrent au sein du GIE AG2R, légèrement en baisse par rapport à 2022, et que 70 % de ces démissions concernent des salariés de 10 ans ou moins d’ancienneté en 2023.

Les élus jugent que la dégradation des conditions de travail, le manque d’attractivité des rémunérations, et le peu de perspectives d’évolutions hors mobilités professionnelles expliquent cette situation.

La sous-traitance

Parallèlement à la baisse d’emploi dans l’activité santé prévoyance, les élus constatent que la sous-traitance demeure le premier motif de recours dans la gestion des charges de travail fluctuantes.

Au global sur l’UES, la sous-traitance emploie aujourd’hui l’équivalent de 1000 ETP, représente 15 % des frais de gestion et un tiers des frais de personnel.

Pour les élus CSE, ce recours massif à des acteurs externes ouvre la question de nos missions en tant que Groupe de Protection Sociale et des activités de cœur de métier qui doivent être traitées en interne. Cela pose également la problématique des risques liés à la fuite d’informations sensibles ou de violation de données (RGPD).

Le groupe AG2R LA MONDIALE doit-il être un simple assureur de risques ou un groupe de protection sociale acteur dans les prestations qu’il doit à ses ressortissants ?

Emploi dans le commercial

Une diminution des emplois est également constatée dans le secteur commercial. En effet, il est enregistré une diminution de 26 salariés en 2023, après une diminution de 47 salariés en 2022. Entre fin 2016 et fin 2023, c’est une chute de 37% qui est à noter, soit 219 salariés.

Les élus jugent que cette tendance est incompatible avec les enjeux affichés par le groupe de conquête de nouveaux clients, de maintien de portefeuilles et de satisfaction clients.
De plus, la population des commerciaux est faiblement renouvelée, ainsi la pyramide des âges, dans ce secteur d’activité, fait état de 52 % des CDI qui ont plus de 50 ans, et seuls 16 % des effectifs ont moins de 40 ans. 

Les élus relèvent également que si la volonté affichée de la direction est bien de revenir à un développement commercial, cette nouvelle ambition risque de se heurter à un manque de moyens chez les commerciaux mais aussi dans les directions techniques. Ainsi, dans le courtage, les volumes d’études et le taux de transformation sont en chute depuis 2 ans, non seulement en raison du durcissement de la politique de souscription, mais aussi d’un manque de ressources pour étudier les dossiers, en premier lieu sur le segment des ETI.

En revanche, les élus notent qu’en 2024 les effectifs commerciaux devraient se stabiliser en lien, selon la direction, avec le souhait de repartir en conquête de nouveaux clients, notamment sur le marché de l’Entreprise. Ils notent également que les départs de CCFF et CAE devraient être désormais intégralement remplacés.

Les élus espèrent que cette ambition se concrétisera enfin, après plusieurs années de promesses non tenues et la dégradation des conditions de travail de l’ensemble de la population commerciale.

Contrats d’alternance

Le nombre d’alternants est en baisse en 2023 et ne représente plus que 2,6% des effectifs.

La transformation en embauche (cdd ou cdi) depuis 2021 n’est que de 6 %. Ce taux décline à 1 % dans un secteur d’activité qui recourt massivement à l’alternance, en l’occurrence le commercial.

Ces chiffres sont incompatibles avec les objectifs fixés par la direction générale qui a introduit, dans le nouvel accord d’intéressement, un critère sur le nombre d’alternants dans le groupe.  L’objectif 2024 fixé étant de 5% pour le GIE AG2R et de 4% pour l’IRC, soit le double du pourcentage 2023. Selon nous, il est essentiel de mettre en œuvre des stratégies afin d’attirer des alternants motivés qui envisagent un avenir durable au sein de l’entreprise à la fin de leur alternance.

Plan de recrutement

Au manque de visibilité entre les besoins exprimés par les directions métiers et les plans de recrutement s’ajoute une différence entre les trajectoires d’effectifs présentées dans les observatoires des métiers et les réalisations effectuées en 2023.

Ainsi, sur les métiers de technique assurantielle, conformité, commerciaux, conseillers clientèle, alors que les trajectoires étaient prévues à la hausse, une baisse des effectifs a été enregistrée en 2023.

L’égalité professionnelle

Un problème de promotions vers des postes à plus hautes responsabilités et à plus fortes rémunérations existe et est occulté par l’index égalité. Ainsi en 2023, alors que la catégorie des employés contient 82% de femmes, et qu’elles sont encore 78% dans la catégorie AM, elles ne sont plus que 50% dans la catégorie cadre.

Les élus pointent la problématique d’accès aux postes de managers de direction, qui est rendu difficile pour les femmes.

En effet, alors qu’elles sont à parité avec les hommes dans la classe 6 (52%), elles ne sont plus que 46% dans la classe 7 et leur nombre tombe à 24% dans la classe 8. Cette situation influe sur la rémunération des femmes qui, accédant plus difficilement aux postes à plus hautes responsabilités, atteignent aussi plus péniblement les plus hautes rémunérations.

Cette situation n’est pas améliorée par le dispositif des People Review, où la direction fait délibérément le choix de n’identifier que 37 % de femmes avec un haut potentiel.

Au niveau de l’UES, l’écart sur les salaires moyens est en faveur des hommes. En effet, les femmes ont un salaire moyen inférieur de 27,7% par rapport aux hommes, de 26,2% si l’on regarde le salaire médian. Ce différentiel se retrouve particulièrement dans les plus hautes classes (6 à 8), un équilibre tend à se mettre en place sur les plus petites classes.

Cet écart se retrouve également dans le versement des primes exceptionnelles non commerciales, puisqu’il est en 2022 de 51,9% inférieur pour une femme.

Les élus constatent que le temps partiel est très majoritairement féminin. Ainsi, chez les employés, 28% des femmes sont à temps partiel, contre 10% des hommes, chez les AM, elles sont 21% et les hommes 6%, chez les cadres 15% et les hommes 5%. 

Or :

– 96 % des effectifs ont accès à la formation contre 94% des temps partiels.

– 18 % des effectifs ont accès aux promotions, alors que ce taux est ramené à 11 % aux temps partiels.

– 33% des effectifs ont eu accès aux augmentations individuelles, contre 30% des temps partiels.

Le temps partiel est souvent un obstacle à l’avancement professionnel. Ces salariés sont désavantagés par rapport à leurs collègues à temps plein. Les chiffres précédemment cités font état d’accès moindre à la formation, aux promotions ou aux rémunérations. Il est important de s’assurer que les critères de promotion et d’avancement professionnel sont basés sur les performances et les compétences, et non sur le temps de travail.

La formation

Si les élus constatent une augmentation des dépenses de formation (11 214 K€ en 2023 vs 10 433 K€ en 2022), soit des dépenses correspondant à près de 5% de la masse salariale, il est également important de noter une hausse du temps passé en formation et du nombre de participants aux sessions de formation.

Ils jugent également positif la hausse des taux d’accès à la formation (91% en 2023 vs 88% en 2022) et notamment chez certaines catégories de salariés auparavant en retrait, comme les salariés plus expérimentés et plus âgés notamment.

En revanche, les élus constatent que le volume des formations métiers évolue peu et qu’une bascule s’est opérée vers les formations transverses.
Nous notons, par ailleurs, une baisse de la satisfaction exprimée dans les évaluations à froid. Ces notes obtenues, plus faibles ces dernières années, trouvent peut-être leur origine dans la part croissante des formations transverses tels que la maîtrise des risques, la fraude …. Sans effet nécessairement perçu dans le quotidien des salariés.

De ce fait, une grande disparité existe dans le taux d’accès de 97%, qui comprend les formations obligatoires et les formations transverses, quelle que soit la durée des formations. Ce taux d’accès perd de ce fait sa pertinence vis à vis de l’employabilité.

Il serait intéressant de distinguer, dans les chiffres présentés, ceux liés à la formation obligatoire de ceux qui correspondent plutôt à des formations répondant à une demande des salariés (soft skills par exemple).  

La politique relative aux conditions de travail et à la qualité de vie au travail

Flex Office

Les élus déplorent qu’aucune évaluation globale de la mise en place du Flex office ne soit envisagée, notamment sur :

– le bien être des salariés ;

– l’organisation (efficacité, qualité du travail, transversalité…) ;

– la performance environnementale ;

– le rapport coûts/économies.

La réussite de ce projet « Flex office » dépend avant tout de la manière dont il est mis en œuvre et géré au sein de l’entreprise. Il est donc primordial de tenir compte des besoins spécifiques des salariés ainsi que des organisations de service.

L’engagement des salariés

En 2023, les élus notent que les résultats du baromètre d’engagement des salariés sont en amélioration. Ainsi, sur le niveau de connaissance des orientations Groupe, l’indice passe de 67% à 84% de répondants qui déclarent les connaître, sur le niveau d’adhésion à la stratégie l’indice passe de 50% à 72%, sur le niveau de confiance dans l’avenir du Groupe l’indice passe de 53% à 73%.

Cependant, sur le rythme des changements, seuls 47% déclarent que celui-ci est adapté.  Sur l’implication dans les changements, une faible majorité des salariés (52%) se sent acteur du changement.

Les élus concluent que l’état d’esprit des salariés est encore potentiellement dégradé dans un contexte de réorganisation et d’incertitude sur la stratégie. C’est pourquoi il leur parait opportun d’analyser les dispersions de répondants par structure, par famille de métiers et par ancienneté, pour identifier d’éventuelles zones d’actions prioritaires.

L’absentéisme

Si d’une part, les élus notent une baisse globale de l’absentéisme qui revient à son niveau de 2021, ils remarquent que cette diminution est due principalement à la baisse des arrêts longs, les arrêts de courte durée restant stables, à un niveau relativement élevé.

D’autre part, les taux d’absentéisme restent élevés dans certaines régions (PACA, Aquitaine, Est, Outremer).

Une augmentation de l’absentéisme est aussi à remarquer dans certaines familles de métier : l’actuariat et la technique juridique, la maintenance logistique achat, les métiers du social et le management.

Les élus jugent que l’absentéisme nécessite une approche proactive pour en comprendre les causes sous-jacentes.

Aussi, les résultats devraient pouvoir être analysés à une maille plus fine que les régions, les tranches d’âge ou les familles de métier, avec les principales caractéristiques des salariés du périmètre (démographie, ancienneté, genre, emplois exercés et conditions d’emploi…).

Ils estiment également que des dispositifs contenus dans le nouvel accord QVCT pourraient permettre d’améliorer considérablement le suivi et l’analyse de l’absentéisme, en intégrant le déclenchement de diagnostics locaux, à l’aide d’indicateurs d’alerte.

La charge de travail

Les élus regrettent que, dans l’UES, aucun suivi direct et global de la charge de travail ne soit réalisé.

Ce suivi de la charge ne fait pas l’objet d’un dispositif structuré spécifique, avec des outils de suivi de la charge par exemple. Des indicateurs existants tels que le suivi des heures supplémentaires ou les entretiens professionnels, bien qu’importants, ne sont pas suffisants pour traduire complètement la charge réelle de travail, ainsi que la charge ressentie par les salariés. De plus, les élus n’ont pas connaissance d’analyse de ces indicateurs. Enfin, les baromètres d’enquêtes internes ne s’attachent pas à mesurer l’opinion des salariés sur ce sujet.

C’est pourquoi les élus souhaitent que ce sujet soit porté comme priorité dans les travaux RH et les travaux de la CSSCT pour tous les périmètres d’activités de l’UES, avec des outils qui permettraient d’objectiver la démarche.

La politique salariale

Les élus notent que le bilan de la politique salariale 2023 montre une progression importante de l’enveloppe des mesures octroyées pour les NAO.

Ainsi l’enveloppe NAO s’est établie à 15M€ vs 9,78M€ en 2022, sous l’effet en particulier de mesures collectives qui ont été octroyées à la quasi-totalité des salariés (9,41M€).

Si en 2023, 96,9% des salariés auront bénéficié d’au moins une mesure et que la campagne d’augmentations individuelles a été nettement plus favorable tant en nombre de bénéficiaires qu’en montant moyen, les élus constatent néanmoins que seule une petite moitié des salariés (47%) a bénéficié d’une augmentation individuelle.

Malgré une enveloppe NAO plus conséquente en 2023, les élus notent que la masse salariale du GIE AG2R continue de reculer en 2023 de 3,3%. Les effets de revalorisation collective et individuelle des salaires n’ont pas compensé l’impact de la poursuite de la baisse des effectifs moyens CDI du GIE en 2023 (-5,2% de masse salariale).

Côté IRC, la masse salariale ne progresse que de 2,8%, compte tenu que seulement la moitié des embauches prévues a été réalisée en 2023.

Enfin, les élus veulent mettre en exergue la baisse des frais de personnel de plus de 20% entre 2015 et 2023. La part des frais de personnel dans les frais de gestion de l’UES est ainsi passée de 67% en 2015 à 54% en 2023. Peu d’entreprises de notre secteur n’ont autant fait peser leurs économies de gestion sur la réduction des frais de personnel.

Conclusion

En 2023, l’UES a connu une forte dynamique de recrutement, avec une augmentation significative du taux d’entrée CDI. Cependant, cette croissance des effectifs a été portée uniquement par l’IRC, tandis que les effectifs du GIE AG2R ont diminué. Malgré les revalorisations des salaires d’embauche décidées par la direction en 2023, les élus pointent le manque grandissant d’attractivité du groupe, notamment à cause du décalage salarial avec nos principaux concurrents.

Les élus soulignent le manque d’adéquation entre les besoins humains et les moyens. En effet, la baisse du niveau d’emploi CDI dans le GIE AG2R n’est pas compensée par le recours aux CDD. Les élus déplorent également que cette adéquation entre le volume d’emploi, les évolutions des activités et les besoins remontés par les directions ne soient pas étudiés et débattus au sein du CSE.

En parallèle à la baisse d’emploi dans l’activité santé prévoyance, les élus constatent que le recours à la sous-traitance est massif, ce qui ouvre la question des missions du groupe et des activités de cœur de métier qui devraient être traitées en interne.

L’absentéisme reste élevé dans certaines régions et métiers. Les élus jugent que celui-ci devrait pouvoir être analysé à une maille plus fine, avec les principales caractéristiques des salariés du périmètre.

Par ailleurs, les élus regrettent que dans l’UES, aucun suivi direct et global de la charge de travail ne soit réalisé, et souhaitent que ce sujet soit porté comme priorité dans les travaux RH et les travaux de la CSSCT.

En matière d’égalité professionnelle, les élus constatent qu’un problème de promotions vers des postes à plus hautes responsabilités et à plus fortes rémunérations perdure pour les femmes.

Enfin, la politique salariale 2023 a montré une progression importante de l’enveloppe des mesures octroyées pour les NAO. Cependant, la masse salariale du GIE AG2R continue de reculer, les effets de revalorisation collective et individuelle des salaires n’ayant pas compensé l’impact de la baisse des effectifs.

En conclusion, les élus appellent à une meilleure adéquation entre le volume d’emploi, les évolutions des activités et les besoins, à une politique plus équitable en matière d’égalité de genre, à une évaluation globale de la mise en place du Flex office et à un suivi plus rigoureux de la charge de travail.

Ils appellent aussi à ne plus faire porter les économies de gestion sur les frais de personnel, la limite du supportable ayant été atteinte.

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