Lors de la réunion plénière du Comité d’Entreprise le 30 octobre, les élus ont donné leur avis sur la politique sociale, l’emploi et les conditions de travail dans le groupe. Ils ont noté que “la situation suscite des craintes importantes et des pertes de repères dans les équipes”.
Texte de l’avis rendu :
Le CE du GIE AG2R Réunica est consulté dans le cadre de l’article L 2325-35 du Code du travail relatif à la consultation sur la politique sociale, l’emploi et les conditions de travail.
Au vu de l’importance des enjeux, nous souhaitons, pour les consultations à venir, disposer d’un document élaboré par la Direction du GIE, présentant son analyse des enjeux, ses intentions, plans d’actions et résultats à date. Ce document – complété des indicateurs sociaux et thématiques prévues par le législateur – constituerait le socle de la consultation.
Sur l’emploi et les conditions de travail
Les indicateurs sociaux font apparaître des points de vigilance sur l’emploi et les conditions de travail :
– La décroissance des effectifs (-4,9% d’effectifs CDI au 31/12/2017 par rapport au 31/12/2016), est nettement plus rapide que la trajectoire qui nous a été présentée dans le cadre des orientations stratégiques du GIE en 2017.
– Nous n’avons pas eu de réponse concernant le seuil de réduction des effectifs à partir duquel une politique d’embauche doit être réenclenchée.
– Le nombre de départs est tiré par une accélération des départs à la retraite, 58% des départs en 2017.
o D’ici 2020, 12% des effectifs CDI partira à la retraite. Quelle est la gestion prévisionnelle de ces départs ? Comment sera gérée la perte d’expertise ?
o Comment maintenir une qualité de service acceptable compte tenu de ces départs ?
o Dans le même temps, la proportion des salariés de moins de 35 ans diminue encore (13% en 2017 contre 15% en 2016 et 18% en 2015). Le renouvellement générationnel n’est donc plus assuré. Cette tendance ne va-t-elle pas rendre plus difficile la transition digitale ?
– La baisse des effectifs CDD dans le groupe (-15% par rapport à 2016) s’est faite au profit de l’externalisation de certaines activités. Ce transfert s’était fait jusqu’à présent sur des tâches à « faible valeur ajoutée ». Il se fait maintenant sur des métiers plus complexes avec une perte d’expertise interne et un impact sur l’emploi.
Un lien existe entre la baisse des effectifs et l’augmentation de la charge de travail, la dégradation des conditions de travail et l’augmentation de l’absentéisme.
– Nous avons noté une nouvelle année d’augmentation du taux d’absentéisme pour maladie / AT / maladies professionnelles, au-dessus de la moyenne des entreprises du secteur des services (dernier baromètre Ayming). Mise en perspective avec le dernier baromètre social interne du GIE, nous nous interrogeons sur la lassitude de tous les salariés du groupe.
– Il nous apparaît indispensable de trouver des leviers de motivation, de soutien et de protection de la santé des collaborateurs, notamment dans un contexte très exigeant. Or, à ce stade, nous n’avons pas encore connaissance de plans d’action construits et permettant d’agir durablement et « à la source » sur l’amélioration des conditions de travail, même si l’’entreprise affiche dans son plan Demain 2020 l’intention « d’articuler performance et Qualité de Vie au Travail ».
– On peut saluer la volonté de la Direction dans la mise en place du télétravail, largement plébiscité par les salariés du Groupe. Toutefois ce très fort engouement peut être aussi révélateur de conditions de travail dégradées.
– Il nous faut avoir un dialogue social sur la politique en matière de QVT / prévention des risques professionnels, qui prendrait en compte en particulier les sujets de charge de travail, de cible collective d’emploi, de parcours professionnels individuels, et de moyens dédiés à l’accompagnement du changement. C’est pourquoi, nous demandons une négociation sur la QVT sur ces thèmes.
Sur la politique de formation
En 2017, l’effort de formation de l’entreprise, en montant et en heures, recule de près d’un tiers par rapport à 2016.
Cette situation est inquiétante pour l’avenir, car compte tenu des enjeux de transformation de l’entreprise, la formation est un outil essentiel d’accompagnement au changement.
Nous resterons vigilants sur ce sujet afin que le Groupe se donne réellement les moyens de ses besoins d’adaptation et de ses ambitions.
Sur la politique de rémunérations
La poursuite de la baisse de la masse salariale en 2017 (-2,6%) tient principalement à la réduction drastique du volume de l’emploi. Nous déplorons que ces départs n’aient pas conduit la direction à redistribuer une partie des économies réalisées dans une politique salariale plus volontariste. Ainsi, les mesures d’augmentations individuelles sont passées de 29% de l’effectif CDI en 2015, à 27% en 2016 et à 22% en 2017.
Dans le même temps, les mesures d’augmentation collectives du GIE ont été nulles pour 2017. Les mesures décidées par la branche n’ont pas permis de compenser cette absence de revalorisation et de compenser l’inflation.
Sur la Gestion Prévisionnelle des Emplois et Compétences
Enfin, nous relevons l’importance de la négociation qui va s’ouvrir prochainement sur la GPEC.
Or, cette négociation débute mi-novembre pour une conclusion prévue en fin d’année. Comment dans un agenda si contraint serons-nous en mesure de conduire un projet si lourd ? De plus en plus de négociations sont engagées à marche forcée et sur des délais trop courts, aussi peut-on légitimement s’interroger sur la place et le rôle des partenaires sociaux.
D’autre part, nous nous interrogeons sur les nouvelles orientations de la politique en matière d’emploi et de compétences de la direction, d’autant que rien ne transparait sur les conséquences du rapprochement avec la MATMUT :
– Les trajectoires d’effectifs par activités, métiers et bassins d’emploi, permettront-elles d’anticiper les évolutions et de favoriser l’anticipation et l’accompagnement des transformations ?
– L’engagement de maintien de l’emploi des collaborateurs du GIE AG2R Réunica sera-t-il maintenu ?
– Les mobilités géographiques hors bassins d’emploi de collaborateurs en lien avec les besoins de l’entreprise seront-elles toujours basées sur le volontariat ?
– A l’inverse, les mobilités internes à la demande des collaborateurs seront-elles mieux prises en compte ?
En conclusion.
Les injonctions de baisse des coûts de l’AGIRC ARRCO et l’intensité concurrentielle accrue dans le secteur de la santé prévoyance pèsent sur le fonctionnement du groupe. Le contexte de transformation des emplois et des compétences, lié aux évolutions du secteur, aux rapprochements et au Digital, débouche sur de véritables transformations culturelles.
Les enjeux pour tous les collaborateurs sont très importants : il en va de leur employabilité, des moyens d’accompagnement et de développement des compétences mis en œuvre par l’entreprise, du sens et de la qualité du travail, des conditions de travail. Par ailleurs, le middle management à qui incombe une grande partie de cet accompagnement, est lui-même en souffrance tant le manque de vision stratégique, les décisions contradictoires et la perte d’autonomie décisionnelle sont devenus leur quotidien.
– Une importante capacité d’adaptation leur a été et continuera de leur être demandée.
– La conjonction de la trajectoire des effectifs, des déploiements d’outils et des programmes de transformation à opérer conduit à des tensions inhérentes à l’augmentation de la charge de travail, et ne permettent plus aux collaborateurs de produire dans de bonnes conditions le niveau de qualité attendu par le client
– A la baisse des effectifs plus rapide que la trajectoire s’ajoute une absence de visibilité quant à la cible chiffrée par métier.
Aujourd’hui, cette situation suscite des craintes importantes et des pertes de repères dans les équipes. Il devient indispensable que la Direction donne une trajectoire stratégique plus précise mais également plus opérationnelle sur les évolutions à venir.