La crise sanitaire n’est pas terminée et il est peut-être trop tôt pour en tirer un bilan exhaustif. Cependant, deux certitudes existent : les difficultés économiques et sociales seront majeures et il y aura un avant et un après crise où les modèles existants devront être remis en cause.
Au niveau de la société, la crise a mis en lumière les services publics et leur nécessité. Ces services, que certains qualifiaient de « non rentables », ont démontré que sans eux les besoins vitaux de la société comme la santé, l’éducation, la sécurité, les transports, l’énergie, la recherche… n’étaient plus assurés.
Au contraire, la crise a démontré que ces services publics devaient être encore plus accessibles et que la protection sociale qui couvre aussi bien la santé que l’emploi est la réelle providence d’un état au service de ses concitoyens les plus fragiles. Le système français, parfois accusé d’être trop couteux, a joué son rôle d’amortisseur et l’idée que la santé n’a pas de prix ou tout au moins ne doit pas être une marchandise commence à être largement partagée.
Le groupe AG2R LA MONDIALE a fait de la protection sociale sa raison d’être.
Sa légitimité en tant qu’acteur dans l’après crise devrait être renforcée, d’autant que le groupe est à but non lucratif et que son mode de gouvernance est entièrement démocratique, basé sur le paritarisme et le mutualisme.
La direction du groupe saura-t-elle jouer son rôle ?
Les difficultés économiques auxquelles les assureurs de personnes comme AG2R LA MONDIALE vont être confrontés dans les mois et les années qui viennent ne doivent pas les faire dévier de leur cap. Car face aux assureurs capitalistiques, les assureurs mutualistes et paritaires ont une légitimité accrue dans le contexte actuel. Leur raison d’être est un élément différenciant majeur.
Une direction lucide et ambitieuse devrait même créer de nouvelles activités dans le groupe à partir du constat sociétal de l’après crise.
Car la crise a révélé aussi les failles de notre société.
La vulnérabilité de ceux qui sont éloignés du cœur de notre modèle de protection sociale et de l’emploi de qualité (les précaires, les indépendants) et des personnes les plus fragiles de notre société (les sans-abris, les migrants, les personnes dépendantes et handicapées, les victimes de violence intrafamiliales, etc.).
Les inégalités de notre société (ou injustices perçues) se sont révèles sous plusieurs aspects. Il y a au d’abord le rapport au confinement avec les différences entre ceux qui le passent dans leur résidence secondaire et ceux qui vivent les uns sur les autres. Au travail, les inégalités sont apparues entre les « exposés » et les « protégés », et « ceux qui payent le confinement des autres ». Mais aussi le télétravail lui-même a été révélateur de différences en fonction du rapport au numérique, des conditions de vie et d’équipement, de la charge de travail, du fait de garder ou pas ses enfants et dans le rapport à la continuité pédagogique (ceux qui peuvent faire école à leurs enfants et les autres).
La crise a mis au grand jour un certain nombre de fractures sociales et a favorisé l’émergence de nouvelles formes de risques psychosociaux.
Un groupe de protection sociale comme AG2R LA MONDIALE ne peut pas avoir comme ambition de révolutionner la société. Mais il peut apporter sa pierre à l’édifice de la construction d’une nouvelle protection sociale.
Face à des assureurs capitalistiques comme AXA, premier assureur en santé et prévoyance en France, se positionner comme un acteur majeur de l’économie sociale et solidaire a un véritable sens aujourd’hui.
C’est pourquoi la CFDT ne comprend pas pourquoi le nouveau plan d’entreprise du groupe AG2R LA MONDIALE qui fixe la stratégie pour les années 2020 à 2022 ne prend pas en compte ces enjeux.
Construit en 2019, il serait pourtant important de, sinon le reconstruire, tout au moins l’amender profondément, pour faire face aux nouveaux défis de la protection sociale en France.