AG2R LA MONDIALE a reçu le prix « platinum Award » par le média britannique IPE Real Assets récompensant son engagement en faveur de la diversité. Pourtant, au-delà des actions indéniables du groupe dans ce domaine, la réalité en interne n’est pas aussi rose.
Le média britannique a notamment relevé l’amélioration de l’index de l’égalité femmes – hommes. Et le Président du Jury des IPE Real Estate Global Awards a conclu : « une expérience unique, très multidimensionnelle et holistique d’un point de vue DEI (Diversity Equity Inclusion) avec un accent particulier mis sur les femmes … ».
La CFDT ne partage pas complètement cette analyse flatteuse de la politique RH du groupe vis-à-vis des femmes et les chiffres donnent raison à notre vision plus mesurée de cette réalité.
L’index égalité en question.
Le groupe et IPE Real Assets mettent en avant le bon score réalisé par le groupe dans l’index de l’égalité hommes femmes.
La loi « Avenir professionnel » de 2018 prévoit que chaque année l’employeur doit publier des indicateurs relatifs aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes ainsi que les actions mises en œuvre pour les supprimer. L’index parait donc comme un outil de mesure intéressant, mais si on regarde son mécanisme de plus près, on constate qu’il ne rend pas compte de la situation comparée des hommes et des femmes dans toutes leurs inégalités.
Pour comprendre la démarche de construction de l’index, il faut distinguer deux situations différentes.
En premier lieu, existe un écart salarial expliqué par les différences de caractéristiques des emplois occupés par les femmes et les hommes. Dans le groupe AG2R, vous avez par exemple beaucoup plus d’hommes à des postes de directions que des femmes. Ils accèdent donc à de plus hautes rémunérations.
En second lieu peut exister un écart de salaire inexpliqué, dit résiduel, qui ne sont pas liés à la différence d’emplois.
Or, l’index est pensé comme un outil permettant de mesurer et rendre « publiques » ces inégalités résiduelles, et de les réduire par une lutte contre les discriminations directes. Il laisse donc de côté les inégalités liées aux temps de travail, aux différences de carrières, à la sous-valorisation des emplois féminisés, qui sont des effets de discriminations systémiques.
Toutes ces imperfections dans la construction de l’index a conduit le CEREQ, centre d’études et de recherches public sur les qualifications de conclure dans son rapport de 2022 que :
« En se concentrant sur les écarts de salaires inexpliqués au sein des entreprises, l’Index continue à invisibiliser les premiers facteurs d’inégalités : la surreprésentation des femmes dans les emplois à temps partiel et parmi les bas salaires, ainsi que dans certains secteurs et métiers sous-valorisés, où leurs compétences sont partiellement, voire totalement non reconnues, parce que jugées « naturelles ». De plus, l’Index laisse dans l’ombre les discriminations subies par les femmes tout au long de leur parcours professionnel. »
Ce constat est applicable à l’UES AG2R.
Les résultats du calcul de l’index aboutissent à un score de 92 pour l’UES AG2R, ce dont se félicite la direction en indiquant être de 17 points au-dessus du minimum requis par la loi. Cependant, l’index masque une autre situation dans l’UES.
Au-delà de l’index, l’examen de la situation comparée des femmes et des hommes montre qu’il n’y a pas de problème de discrimination salariale dans un même emploi entre les femmes et les hommes. En revanche, un problème de promotions vers des postes à plus hautes responsabilité et à plus forte rémunération existe et est occulté par l’index égalité.
Ainsi en 2022, alors que la catégorie des employés contient 81% de femmes, et qu’elles sont encore 78% dans la catégorie AM, elles ne sont plus que 49% dans la catégorie cadre.
Et si l’on examine de plus près la catégorie cadre, on constate que c’est l’accès aux postes de managers, notamment de direction, qui est rendu difficile pour les femmes. En effet, alors qu’elles sont à parité avec les hommes dans la classe 6, elles ne sont plus que 44% dans la classe 7 et leur nombre chute à 22% dans la classe 8.
Cette situation influe sur la rémunération des femmes qui, accédant plus difficilement aux postes à plus hautes responsabilité, atteignent aussi plus péniblement les plus hautes rémunérations.
L’écart sur les salaires moyens est en faveur des hommes, leur salaire moyen est 1,28 fois plus élevé que celui des femmes et 1,26 fois plus pour le salaire médian. Cet écart se retrouve également dans le versement des primes exceptionnelles, puisqu’il est en 2022 de -51,9% pour une femme.
Autre problématique occultée par l’index égalité : la pénalisation des temps partiels. Le temps partiel est très majoritairement féminin. Ainsi, chez les employés, 28% des femmes sont à temps partiel, contre 10% des hommes, chez les AM, elles sont 21% et les hommes 6%, chez les cadres 15% et les hommes 5%.
Or,
- Seuls 83% des temps partiels ont accès à la formation contre 89% pour l’ensemble de l’effectif.
- 9% des temps partiels ont accès aux promotions contre 12% pour l’ensemble de l’effectif
- Et 17% des temps partiels ont accès aux augmentations individuelles contre 28% pour l’ensemble de l’effectif.
L’ensemble des organisations syndicale a signé l’accord sur l’égalité entre les hommes et les femmes chez AG2R, car les mesures contenues permettront de travailler sur le sujet.
Cependant, la situation dans le groupe est loin « d’être rose » aujourd’hui, malgré ce que laisse penser la direction dans sa communication. Le chemin vers l’égalité reste encore long chez AG2R …
Le jury de IPE Real Assets devait avoir une poutre dans l’oeil au moment de voir le dossier 🤣. Les chiffres, on leur fait dire ce que l’on veut, d’autant que sur certains de ces indices, les critères sont cachés et non divulgués… ben voyons…
C’est comme pour l’organisation du travail (flex, open-space, …) le groupe a 10 ans de retard… Ce qui équivaut à une bonne marge de progression, finalement.